Avoir 13 ans un vendredi 13

Il faut un méga sentiment de liberté pour se trimbaler à un concert metal avec sur le dos un tee-shirt à l’effigie de Will Smith. Vendredi 13 septembre, lancement simultané du festival et de décibels saturées. Rien n’est laissé au hasard dans le choix des vêtements. Les looks comptent double. Ils gueulent une préférence, portée par le noir, confirmée par le nom d’un groupe à la typographie hérissée ou dans l’ébrouement d’une chevelure qui laisse au chroniqueur en perte de vitesse capillaire un sentiment mitigé d’admiration et de nostalgie. Le metal a gardé un certain goût pour le spectacle, la démesure et la fantaisie. Sur scène, on se régale. Et le public n’est pas en reste.

Qui ose profaner l’ambiance ? Se balader comme si de rien n’était avec affiché sur le torse le visage du prince de Bel-Air (à l’âge adulte) ? Et je ne parle pas ici d’un curieux égaré là en croyant assister à une séance de méditation collective, abusé par Mantra, le nom d’un des groupes programmés. J’évoque un ultra fan le poing levé qui hoche la tête en rythme. Ce type est capable de débarquer à un rassemblement de Hells Angels en Vespa jaune fluo. Et vous savez pourquoi ? Il est pile poil entre deux moments, dans un espace – affranchi des snobismes et du regard des autres – qui ne dure que quelques mois : il a 13 ans.

S’il avait eu le choix, Eflam* aurait choisi son tee-shirt Megadeth. Mais il n’a pas eu le temps de se changer vendredi en fin d’après-midi quand son père lui a fait la surprise. Débarqué en mode parachutiste, il a retrouvé sur place ses deux potes Mael et Melaine, eux aussi amateurs éclairés de cette musique qui chauffe à blanc toutes les cordes. Les trois comparses envisagent de créer un groupe… Quand ils auront trouvé un batteur et un chanteur, me disent-ils. J’aurais aimé donner ici le nom du futur combo, mais ils en débattent encore.

Il y avait un vent de liberté au Liberté vendredi soir. La vraie liberté, pas celle qui pose et fait de grands discours, la liberté de profiter à fond du moment en oubliant d’évaluer l’opinion des autres. C’est peut-être une caractéristique de la scène metal ? En espérant vous retrouver sur scène un de ces quatre… continuez à vous amuser les gars. On s’en fout du tee-shirt.

Raoul Kalin

* Les prénoms n’ont pas été modifiés pour que chacun puisse se reconnaître